mardi 25 novembre 2014

La littérature gothique est dans la Pléiade

Le Moine  de Dominik Moll

La Bibliothèque de la Pléiade de Gallimard vient de publier Frankenstein et autres romans gothiques. Comme son nom l’indique, il s’agit d’une anthologie de cinq romans de genre gothique (genre littéraire né en en Angleterre au XVIIIe siècle), avec de nouvelles traductions.

Les cinq romans sont :

 Le château d’Otrante de Horace Walpole, 1764

L'auteur Horace Walpole (1717-1797), précurseur du roman noir, marquera de son influence de nombreux écrivains tels que Charles Robert Maturin  (Melmoth), Matthew Gregory Lewis (Le moine) et Ann Radcliffe (Les mystères d’Udolphe).

« Le Château d’Otrante », paru en 1764, connaîtra dès sa publication un très grand succès. Si nous le lisons encore à notre époque, c’est avant tout en tant que roman précurseur du genre gothique et non pour ses qualités littéraires. En effet, ce roman est plus...  suite du billet.


Vathek de William Beckford, 1782

Vathek est un roman gothique à thème orientaliste. Version romancée de la vie du calife Al-Wathiq, Vathek est la chronique de la chute d’un calife qui abjure l’islam pour s’engager, avec son allié Nouronihar, dans une suite d’activités licencieuses et déplorables destinées à lui acquérir des pouvoirs surnaturels. Au lieu d’accéder à ces pouvoirs, Vathek descend, à la fin du récit, dans l’enfer gouverné par le démon Eblis où il est condamné à errer sans fin et sans voix.
Source : wikipédia.


Le moine de Matthew Gregory Lewis, 1796

Le Mot de l'éditeur  : pour mettre en scène le combat d'une sainteté qui se défend contre les puissances des ténèbres, Matthew-G Lewis déploie, avec un art consommé de la gradation dans l'horrible, une multitude de récits d'une audace et d'une cruauté rares. Sade et Breton, entre autres, plaçaient très haut ce chef-d'œuvre du roman gothique, dont Antonin Artaud - qui en a réalisé une " copie " - disait : " Je continuerai à tenir pour une œuvre essentielle " Le Moine ", qui bouscule cette réalité à pleins bras, qui traîne devant moi des sorciers, des apparitions et des larves avec le naturel le plus parfait, et qui fait enfin du surnaturel une réalité comme les autres."



L’Italien ou Le Confessionnal des Pénitents noirs de Ann Radcliffe, 1797

L’histoire se passe à Naples, au XVIIIe siècle. Le comte Vivaldi tombe passionnément amoureux de la jeune et belle Elena. L’inégalité de leurs conditions est un obstacle mais Vivaldi ne renonce pas, malgré les prophéties d’un moine mystérieux et l’intervention de l’inquiétant Schedoni, le confesseur de sa mère. Elena est enlevée et Vivaldi retenu prisonnier. Pour se retrouver, ils vont vivre de multiples péripéties qui les mèneront dans des paysages fantomatiques et dans les prisons de l’Inquisition.  Source : Le journal Le Soir.



Frankenstein ou Le Prométhée moderne de Mary Shelley, 1818

Le Mot de l’Éditeur : " C'est alors que dans la lumière pâle de la lune tamisée par les persiennes, je contemplai le pauvre hère - le misérable monstre - que j'avais créé. Il avait soulevé le rideau de mon lit et ses yeux, s'il est permis de parler d'yeux, étaient fixés sur moi. Ses mâchoires s'ouvrirent et il proféra des sons inarticulés, tandis qu'un rictus déformait ses joues. Peut-être parla-t-il, mais je ne l'entendis pas. Il avait avancé une main, sans doute pour me retenir, mais je m'étais déjà enfui et je dévalais les escaliers. Je me réfugiai dans la cour de ma maison et j'y restai jusqu'au matin... J'écoutais de tout mon être, redoutant au moindre son de voir s'avancer le cadavre démoniaque auquel j'avais si misérablement donné la vie. " Publié en 1818, Frankenstein ou Le Prométhée moderne est considéré par beaucoup comme le premier véritable roman de science-fiction jamais écrit. Porté à l'écran à de nombreuses reprises, il demeure indissociable de l'interprétation qu'en donna Boris Karloff dans les années 30.


Extrait de l'interview d'Alain Morvan au journal Le Soir du 22-23 novembre 2014 :

Pourquoi le gothique est-il un phénomène anglais ?

Pour plusieurs raisons. Les Anglais ont d’abord toujours été un peuple de conteurs. Ensuite le théâtre élisabéthain assumait déjà la cruauté et la violence, voyez les pièces de Shakespeare, sanglantes, emplies de fantômes. Et puis les Anglais de l’époque voyagent sur le continent. Ils y découvrent des paysages de montagnes, fracturés, impressionnants, effrayants. Et ça correspond à l’évolution de l’idée de sublime, qui diverge de l’idée de beauté. La beauté est harmonie, régularité, équilibre alors que le sublime est disharmonie, rupture, de l’ordre de l’ineffable et du terrifiant. Le sublime nous séduit parce qu’il nous fait peur : séduction et peur sont des phénomènes de plus en plus conjoints. Et enfin l’éclosion de la poésie préromantique, une poésie de cimetière, avec cette mélancolie qui s’impose, une contemplation de la mort qui frôle parfois une certaine nécrophilie. Tout corps vivant annonce la corruption par les vers. Finalement entre la couche nuptiale et la tombe, il n’y a guère de différence.


Frankenstein et autres romans gothiques, Édition établie par Alain Morvan,  Gallimard La Pléiade,  1.440 p., 58 € jusqu’au 31 janvier 2015, 65 € ensuite.

6 commentaires:

  1. là alors c'est pas le style de lecture que j'aime pourtant j'adore l'art gothique des cathédrales

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Disons que ce genre peut nous sembler naïf à l’heure actuelle mais il faut lire ces auteurs pour ce qu’ils sont, à savoir des précurseurs d'un nouveau genre à l'époque. Et il est intéressant de constater à quel point ces romans ont eu une énorme influence par la suite, sur la littérature mais également au cinéma. J’ai tout de même gardé un excellent souvenir du roman Le Moine de Matthew Gregory Lewis. Le château d’Otrante de Horace Walpole m’avait souvent fait sourire par contre, ce qui n’était sans doute pas le but recherché. J’ai gardé également un assez bon souvenir de Frankenstein de Mary Shelley. Je n’ai pas lu les deux autres par contre (L’Italien de Ann Radcliffe et Vathek de William Beckford). Je ne connaissais d’ailleurs pas du tout ce dernier.

      Supprimer
    2. " Et il est intéressant de constater à quel point ces romans ont eu une énorme influence par la suite, sur la littérature mais également au cinéma."
      Ils ont même été moqués dans la littérature du temps (on pense bien sûr au drolissime "Northanger Abbey" de Jane Austen) et à l'opéra (The Haunted Tower de Stephen Storace : http://cmsdt-spectacles.blogspot.fr/2014/05/the-haunted-tower-la-tour-hantee-1789.html )

      Excellente idée de réunir et de traduire ces romans qui eurent une grande influence sur la sensibilité du temps... malgré quelques longueurs et passages stylistiques relâchés. Merci pour le billet !

      Supprimer
    3. Je trouve également que l'idée est excellente et j'ai été vraiment surprise que cette maison d'édition si prestigieuse s'y soit intéressée, et on profite en plus d'une nouvelle traduction. Merci à vous pour votre commentaire !

      Supprimer
  2. Poe s'en moquera aussi, la dimension ironique de ses textes souvent occultée par leur puissance morbide ; et sans doute difficile (voire impossible ?) de passer après Artaud pour la traduction du Moine...

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Ce serait intéressant de comparer les deux. Ces nouvelles traductions ont été faites sous la direction d’Alain Morvan, spécialiste de la littérature anglaise des XVIIe et XVIIIe siècles. C'est tout de même gage de qualité. Maintenant, je ne sais plus du tout quelle traduction j'ai lue du Moine. Celle d'Artaud j'imagine. De tous les trois romans lus que je cite plus haut dans mon commentaire, c'était de loin mon préféré.

      Supprimer