mercredi 24 janvier 2018

Terremer de Ursula K. Le Guin

Hommage à l'auteur, qui vient de nous quitter…

Ce billet fut écrit en 2008.


Ici, il y a des dragons. Et là où il y a des dragons, il y a des enchanteurs, une mer immense et des îles. Mais le monde de Terremer n’est pas un univers conventionnel de fantaisie. Il n’appartient ni à notre passé ni à notre avenir. Il est ailleurs. C’est un univers où la magie fonctionne et s’enseigne comme la science et la technologie dans le nôtre.

La totalité du cycle de Terremer compte 6 livres :

* Le Sorcier de Terremer (1968)
* Les Tombeaux d’Atuan (1970)
* L’Ultime Rivage (1972)
* Tehanu (1990)
* Les contes de Terremer (2000)
* Le vent d’ailleurs (2001)

Ce présent volume contient les trois premiers livres du cycle.

« Le Sorcier de Terremer » raconte l’apprentissage de Ged, simple gardien de chèvres sur l'île de Gont qui possède le don, à l’école de l’île de Roke,  où il deviendra un sorcier capable de commander aux éléments et d'affronter les dragons. Pourquoi son audace faillit le perdre aussi.

« Les Tombeaux d’Atuan » évoquent la terrible histoire de la petite fille, Ténar, choisie pour devenir la Grande Prêtresse des Tombeaux, qui haïra Ged pour finalement se joindre à lui afin de combattre ensemble l’emprise des Innommables.

« L’Ultime Rivage » évoque quant à lui l’endroit où le pouvoir des sorciers sera soumis à celui du temps, le grand rongeur.

Nous évoluons tout au long de ces récits avec l'Epervier : comment devient-il magicien à la mystérieuse école des sorciers de l'île de Roke ? Quel mage devient-il en tant qu'adulte ? Quelles rencontres et affrontements va-t-il endurer ? Outre son apogée, nous assisterons également à son déclin lorsqu’il perdra peu à peu ses pouvoirs pour redevenir un homme simple.

J'ai beaucoup apprécié ce cycle. Le récit est lent mais intelligent, tout en nuance, emprunt de philosophie, de poésie et de subtilités diverses. Il se différencie de la fantaisie traditionnelle dans la mesure où nous ne sommes pas confrontés au sempiternel combat entre le bien et le mal nécessitant de terribles combats guerriers, mais en présence de récits où tout est question d'équilibre, de juste milieu, où le bien n'existerait pas sans son contraire.

Cette richesse du récit aux multiples interprétations possibles est sans aucun doute redevable au talent d’Ursula Le Guin, qui est l'un des auteurs les plus célèbres de Fantasy et de Science-Fiction, récompensée par plusieurs Prix Hugo et Prix Nebula. Le fait qu’elle soit une passionnée des cultures orientales et une experte en taoïsme contribue à donner au récit un ton qui n’appartient qu’à elle : la recherche de cet équilibre où la Lumière et les Ténèbres se stabilisent mutuellement.

Le fait que le père de l’auteur, Alfred KROEBER, soit un grand anthropologue participe sans nul doute également à son approche anthropologique des sociétés qu’elle imagine : description des paysages et cultures lointaines, analyse des mythes, mœurs, lois, esprit de tolérance et compréhension, respect et intelligence… tous ces éléments jalonnent son œuvre.

Le téléfilm « Terremer, La prophétie du sorcier » [Legend of Earthsea] de Robert Lieberman est une adaptation du premier cycle. Il s'agit d'un téléfilm, donc le budget n'est pas grandiose. Malheureusement, ce qui faisait la particularité de l'écriture d'Ursula (les nuances, la complexité des sentiments, la poésie) a complètement disparu dans cette adaptation. Enfantin et kitch, destiné visiblement à un public d’adolescents américains, nous avons droit à un curieux mélange des trois premiers récits qui n’a plus rien à voir avec l’œuvre de l’auteur, qui a d’ailleurs complètement désavoué cette adaptation. Le réalisateur semble avoir surfé sur la vague Fantasy du moment (en laissant de côté toute l'originalité et l'essence propre du cycle), afin de trouver un public le plus large possible. Dispensable donc.

Le film d’animation de Goro Miyazaki, le manga « Les contes de Terremer », est  essentiellement une adaptation de L’Ultime Rivage, tome III du premier cycle. Mais je ne saurais vous en dire plus, dans la mesure où je ne l’ai pas encore vu.


2 commentaires:

  1. Bonjour Sentinelle et merci pour cet hommage à Ursula K. Le Guin. J'avais beaucoup aimé Le Sorcier de Terremer, sans toufois finir le cycle. L'influence de Le Guin sur Miyazaki est manifeste et par Miyazaki je pense à Hayao et pas à son fils Goro. Le plus beau livre que j'ai lu d'elle, toutefois, c'est La Main gauche de la nuit, un des meilleurs livres de SF que je connaisse.

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    1. Bonjour Strum,

      J'en garde un excellent souvenir. C'est une grande dame de la Fantasy et de la SF, et elles sont plutôt rares dans le genre, raison de plus pour lui rendre hommage. Je n'ai pas encore lu La Main gauche de la nuit, même si le roman est dans ma LAL depuis bien longtemps. Je vais y penser sérieusement dans les mois qui viennent :)

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