jeudi 2 avril 2015

David Bowie et moi

Mais que cache le titre de ce billet, un brin présomptueux de ma part ? A moins que vous n'habitiez sur une autre planète, je pense que tout le monde ici connait le chanteur David Bowie, et quelques-uns d'entre vous ont sans doute déjà entendu parler de la rétrospective "David Bowie is...",  qui après avoir transité par Londres, Toronto, São Paulo et Chicago, passe enfin par Paris (du 3 mars jusqu' au 31 mai 2010). Je n'y suis pas encore allée et j'ignore à ce jour si je vais m'y rendre ou non.  Mais l'occasion était trop belle pour vous parler de ce chanteur,  au timbre si particulier,  qui a marqué ma jeunesse. Plutôt que de vous faire une présentation chronologique succincte de son œuvre, j'aimerais vous faire découvrir comment, à quelle époque et avec quelle musique David Bowie est entré dans ma vie. Un exercice nostalgique que j'affectionne particulièrement dans la mesure où la musique a cette caractéristique très particulière de me projeter dans le passé avec une fulgurance surprenante, son seul rival n'étant autre que l'odorat, très puissant dans le genre également.


Alors  David Bowie  a débarqué par la petite lucarne lorsque j'avais 10 ans, avec le single Ashes to Ashes de l'album Scary Monsters (and Super Creeps), sorti en septembre 1980. Quelle musique, quel voix, quel chanteur et quel clip !!! Je crois bien que je ne m'en suis jamais remise et je ne peux toujours pas écouter ce morceau sans me replonger instantanément dans la peau de cet enfant de 10 ans,  complètement émerveillée et bouche-bée devant ces images insolites et ces paroles dont je ne comprenais absolument rien mais que je soupçonnais d'être très inspirées et hautement spirituelles. Je n'ai d'ailleurs jamais pris la peine de les traduire par la suite, voulant à n'importe quel prix conserver cette parcelle de fascination juvénile.

Et puis Bowie a complètement disparu de ma vie, à tel point que j'avais oublié jusqu'à son nom (un enfant peut se révéler parfois très déloyal envers ses premiers amours).



Puis débarque le fameux single Let's Dance, de l'album éponyme sorti en 1983. Vous me croirez ou non mais je ne reconnais pas du tout le chanteur de  Ashes to Ashes dans ce blond peroxydé, aux gants blancs et pantalon à pinces. Pourtant trois petites années à peine se sont passées entre les deux, mais trois années à cet âge, ce sont presque trois décennies. J'exagère, mais à peine. Quoi qu'il en soit, le chanteur David Bowie fait un tabac avec cette chanson, notamment chez les midinettes de mon âge, c'est-à-dire 13 ans à peine, certaines découvrant pour la toute première fois ce chanteur. Outre la blondeur de Bowie et son teint bien bronzé (les lampes solaires commençaient à faire un tabac également), ce sont les escarpins rouges du clip qui m'ont tapée dans l’œil, que je me suis d'ailleurs procurées quelques mois plus tard.  Ce fut ma première paire à talons hauts. Inutile de dire que j'avais un mal fou à me déplacer  mais je me souviens encore avec une certaine émotion de mon  pantacourt et de mes escarpins dont la couleur rouge tranchait vachement bien avec la couleur blanche du pantalon, marchant toute fière en plein soleil, tout en allant rendre visite à ma copine pour lui montrer ma dernière trouvaille. Bonne fille, elle a tout de suite remarqué qu'elles ressemblaient à celles du clip Let's Dance. Ben oui, tu parles d'une coïncidence hmhm.  Depuis, je marche toujours aussi mal avec des escarpins à talons hauts et j'ai appris à me désespérer de mes fichus petits pieds ridiculement sensibles qui aiment particulièrement les modèles de grands-mères...pffff

Pendant que Bowie enchaîne les tubes, et moi avec (China Girl, Modern Love), je suis plongée dans la biographie de Christiane Felscherinow, qui s'intitule Moi, Christiane F., 13 ans, droguée, prostituée…  Ce livre, publié aux éditions Gallimard en janvier 1983, exerce un étrange mélange de répulsion/fascination sur moi.  Je suis sans doute attirée par la noirceur, la désespérance et la facilité avec laquelle le genre humain peut s'enfoncer dans le sordide et le pathétique, démontrant une  haute capacité à  l'autodestruction. Je me souviendrai toujours de mon exemplaire de poche tout écorné et celui de mon amie préférée de l'époque, qui l'avait en grand format avec des reproductions de photos en noir et blanc des protagonistes.  J'en étais verte de jalousie mais le plus surprenant fut de découvrir le visage d'ange boudeur de la meilleure copine de Christiane, Babsi, qui sera à 14 ans la plus jeune victime de l'héroïne à Berlin. C'était l'époque où je lisais aussi L'herbe bleue, présenté comme le journal intime d'une jeune fille de 15 ans restée anonyme, que je trouvais bien gentille en comparaison à Christiane F.  J'ai appris depuis que ce soi-disant carnet intime avait été attribué à la psychologue américaine Beatrice Sparks. Franchement, cela ne m'étonne pas. Enfin, je reviens donc à mon premier choc littéraire (enfin si on peut vraiment parler de littérature dans ce cas-ci), et les passages de Christiane lorsqu'elle évoque la scène berlinoise de cette époque et les concerts de David Bowie, au public très jeune et sous influence si je peux dire.  Ce sera pendant un de ses concerts à Berlin qu'elle prendra d'ailleurs pour la première fois de l'héroïne. Euh David Bowie, ce blond peroxydé au pantalon à pinces aurait été un chanteur adulé par une  jeunesse totalement déboussolée et plus que passablement camée ? Y'a comme un truc qui m'échappe là. N'oubliez pas qu'à cette époque, internet n'existait pas encore. J'ai donc dû me renseigner autrement, en fouinant dans quelques magazines musicaux mais surtout en achetant des albums de Bowie. Et là, quel choc de découvrir non seulement qu'il s'agissait de mon chanteur du morceau Ashes to Ashes mais qu'il avait connu plusieurs vies avant de débouler avec son Let's Dance. Autant vous dire que j'en ai eu le tournis tant j'en ai pris plein les oreilles en très peu de temps : Space Oddity, The Man Who Sold the World, Diamond Dogs, Young Americans, Station to Station, ChangesOneBowie, Heroes...  ohlala.

Très difficile de choisir un morceau parmi tout cela, mais je me lance avec Space Oddity, sorti en 1969.


Ou encore The Jean Genie, sorti en single en septembre 1972, avec Ziggy Stardust en face B.




Et David Bowie après tout cela ? Et bien j'avoue que je l'ai un peu abandonné depuis pas mal d'années, et si je reviens toujours avec des battements au cœur à tous ces morceaux que j'ai écoutés en boucle pendant mon adolescence, je n'ai pas vraiment enchaîné avec ses derniers albums, comme si Bowie appartenait essentiellement à mon passé et que je ne pouvais y revenir que sur le mode nostalgique et passionnément passionné.

Et si je devais aujourd'hui ne choisir qu'une seule chanson, quelle serait-elle ?  Cette réponse variera sans doute en fonction du temps qui passe mais pour le moment, ce serait sans conteste Life on Mars, que j'adore toujours autant.  Et pour vous  ?




Quoi qu'il en soit, David Bowie est et restera toujours un grand Monsieur et je le remercie de m'avoir accompagnée, à sa manière, toutes ces années. Hommage à vous Monsieur Bowie, jamais plus je ne vous oublierai.


11 commentaires:

  1. Oh comme j'aurais aimé te voir à 13 ans juchée sur tes escarpins rouges, ha ha!! Merci pour cette plongée dans ta Bowie mania, Senti. Vu les années qui nous séparent, je n'ai évidemment pas eu la même approche de l'homme qui commença pour moi dans les années 73/74 avec le démentiel Alladin Sane qu'un copain triomphant me fit découvrir.

    . Sacrée époque et sacrés bouleversements dans ma discographie, moi qui n'écoutais surtout que des Cat Stevens, Elton John et autres America. Ca a fait bim bam boum dans ma tête. Et puis il y a eu Diamond Dogs, Young Americans, Heroes et le reste...

    Si je devais choisir, je dirais ce dernier album, à cause de ces envolées au saxo, réellement grandioses. Mais bizarrement Ashes to ashes ou Let's dance ne sont pas mes préférées..Et puis Heroes qui reste à part <3

    Merci Sentinelle pour ce très chouette hommage à notre idole de jeunesse :-D

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    1. Je ne trouve pas si bizarre que cela que Ashes to ashes ou Let's dance ne soient pas tes préférées, tu avais connu ses meilleurs chansons bien avant cela, tandis que moi je ne faisais que débarquer sur la planète Bowie. Mais je me suis rattrapée par la suite, en remontant le temps en sa compagnie ;-)

      Merci à toi pour ton passage copine !

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  2. Anonyme4/02/2015

    Wow ça c'est de l'hommage à ce cher Bowie ! J'avoue que je ne connais pas tout ce qu'il a fait (il en a fait tellement) mais j'aime ses premiers albums et je suis également une grande fan de Life on Maaaaars et je trouve que le bonhomme a beaucoup de classe !

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    1. Je suis contente que tu apprécies Bowie également Tina. Finalement, il compte pas mal de fans de générations très différentes, ce qui est bien la signature d'un grand talent. J'ai toujours une place particulière dans mon cœur pour des chanteurs aimés en tant qu'enfant et qui ont continué à m'accompagner adolescente et adulte. Il y en a peu qui remontent si loin et qui persistent. Pour moi, ce fut aussi Bashung (j'avais 11 ans à la sortie de Vertige de l'amour), et si je remonte plus loin, ce fut aussi Souchon (J'ai dix ans, Bidon, Jamais content). Ahh que de bons souvenirs tout ça :-)

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  3. Anonyme4/03/2015

    Sa musique est certes très marquée 70s (je parle de cette période en particulier vu que c'est celle qui m'intéresse le plus) mais je trouve qu'elle reste paradoxalement très intemporelle.
    J'aime bien aussi Bashung et Souchon, des mélodies un peu "rock" (en France il n'y en a pas tant que ça) et de beaux textes.
    T'as de beaux souvenirs d'enfant, moi c'est du genre la Star Ac, Lorie... des trucs bien moches et inaudibles quoi...

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    1. Euh effectivement. Mais si ça peut te consoler, je n'ai pas évité non plus la Cloclomania de l'époque, impossible de le manquer d'ailleurs, tant il était partout : sur les ondes, dans toutes les émissions de variétés et dans tous les magazines, dont le fameux Podium (racheté par ses soins) et dans lequel tu trouvais toujours un très joli poster du Monsieur (on n'est jamais aussi bien servi que par soi-même). Et je ne te parle même pas de ses chorégraphies et les déhanchés d'enfer qu'on essayait tant bien que mal d'imiter dans la cours d'école avec les copines. On en a fait des Rhaaaaa Ahhhhh Alexandrie Alexandra ! :-)

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    2. Anonyme4/05/2015

      Ahaha la Cloclomania ça devait être quelque chose, ça devait même taper sur le système à force !

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  4. Nous avons à peu près le même âge... J'ai découvert Bowie au moment où le monde était fan de Michael Jackson : c'est Let's dance, qui est sorti l'année de mes 10 ans,
    et j'étais fascinée par cet homme à l'allure féline (oui, j’avoue, au départ, c'était surtout physique !). Mais il m'a fallu à moi aussi quelques années de plus pour
    découvrir sa carrière "d'avant", bien plus fascinante encore...
    J'ajoute ma voix au plébiscite pour Life of mars, avec un petit faible aussi pour Queen Bitch (du même album, d'ailleurs, si je me souviens bien).
    Quant à Christiane F. c'est une amie qui a insisté pour que je lise, et que je regarde le film, insistant parce qu'elle trouvait que je ressemblais beaucoup à l'actrice qui y
    jouait le rôle de Babsi. C'est en effet une lecture perturbante, qui m'a sans doute dissuadée, à vie, de toucher aux drogues dures ! L'herbe bleue, acheté par ma mère,
    m'a moins marqué (c'est bizarre, j'en ai surtout retenu que la narratrice avait souvent les cheveux très sales parce qu'elle ne pouvait pas les laver, et que c'était la croix et la bannière pour trouver des protections
    hygiéniques quand elle avait ses règles...). Je ne savais pas qu'il ne s'agissait pas d'un vrai journal.
    En tous cas merci pour ce billet, qui m'a permis, du coup, de replonger un peu dans mon adolescence....

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    1. C'est sûr que l'allure féline de Bowie, sa classe et sa beauté androgyne ont aussi contribué à son succès, dire que j'y étais insensible serait évidemment mentir ;-)

      Pour en revenir à Christiane F., ce fut vraiment un grand choc pour moi, d'autant plus que j'avais le même âge que l'héroïne lorsqu'elle s'est prostituée pour la première fois. Je n'ai jamais vu le film mais le livre est effectivement très dissuasif à ce niveau-là, ôtant tout le côté glamour des drogues dures que pouvait parfois donner à penser les stars qui en abusaient. Une réalité très crûe et sans fard qui ne pouvait que nous rebuter à vie, en évitant toute forme de tentation. Tout comme toi, j'ai été beaucoup moins marquée par ma lecture de L'herbe bleue, plus consensuel et peut-être plus donneur de leçon, ce qui n'était jamais le cas avec Christiane F, qui se limitait aux faits, suffisamment significatifs en eux-mêmes. J'en ai gardé d'ailleurs très peu de souvenirs, et cette histoire de protection hygiénique, que j'ai complètement oublié, est effectivement très étrange. Concernant la polémique sur la paternité du livre, j'en ai entendu parler il y a quelques années, et je n'ai guère été étonnée de l'apprendre.

      Merci en tout cas à toi pour ton commentaire Ingannmic :-)

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  5. Je crois que j'ai posté deux commentaires, ayant involontairement validé le 1er avant d'avoir fini de le rédiger...
    Toutes mes excuses !

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    1. Ce ne fut pas le cas, mais dans le cas contraire, ce n'était pas un problème non plus ;-)

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