dimanche 28 septembre 2014

Vulva 3.0 de Claudia Richarz et Ulrike Zimmermann (documentaire)


Deux réalisatrices allemandes abordent l’appareil génital féminin sous divers aspects sociétaux (journalistique, éducatif, médical, artistique), tout en incluant sa confrontation à la norme sociale. 

Le documentaire commence fort : entre les jambes écartées d’une patiente, un chirurgien plastique de Cologne repulpe les lèvres avec de l'acide hyaluronique et s’exclame devant le résultat obtenu. Le documentaire se termine quant à lui par l’opération d’une jeune femme de 24 ans, qui pour répondre aux canons de notre époque (à savoir ceux véhiculés par les médias, la pornographie et les photos retouchées, qui donnent une image publique de la vulve bien éloignée de la réalité), recourt à une intervention chirurgicale esthétique coûteuse et mutilante à souhait : il faut absolument couper ce qui dépasse, diminuer de volume ce qui parait trop grand, mettre de la symétrie là où elle n’a jamais existé ailleurs que sur des photos corrigées par des logiciels de traitement de l’image. 

Entre ces deux séquences, c’est une partie de l’histoire de l’anatomie féminine qui sera parcourue : récits mythologiques, évolution de la médecine et de la psychiatrie (rappelons les mutilations génitales du 19e siècle dans nos sociétés pour soigner l’hystérie et l’hypersexualité des femmes), les pratiques ancestrales de l’excision (de 4 types) et autres joyeusetés (même la Vénus noire du réalisateur Abdellatif Chiche sera entraperçue). 

Heureusement que des séquences humoristiques émaillent le documentaire pour alléger un peu le propos, tant cette partie du corps de la femme semble encore taboue, tout en nous donnant l’impression de ne toujours pas nous appartenir vraiment. Et on se surprend soi-même à ne pas trouver très ragoutantes ces images de vulve au naturel présentées en gros plans à des moments où on ne s’y attend pas (et oui, il y a des poils, ce n’est pas tout rose bonbon, il y en a de toutes les couleurs, de tous les âges, de toutes les dimensions et les petites lèvres sont asymétriques à souhait) et on se dit que nous sommes, bien malgré nous, également influencées par les stéréotypes de notre époque. 

Mais le plus douloureux pour moi fut quand même la séquence finale, celle où cette jeune fille se fait mutiler sciemment pour répondre à l’imagerie sexuelle dominante. Les dictats, imposés par la force mais également ceux qu’on s’impose à soi-même, ont malheureusement encore de beaux jours devant eux. Ce sont finalement les chirurgiens esthétiques qui se frottent les mains tant les affaires sont florissantes. A quand une opération chez les hommes pour aligner leurs testicules afin d’atteindre une parfaite symétrie ? Navrant ? Ben oui.

Un documentaire forcément marquant et interpellant. Le public dans la salle était à 99% féminin, cela va de soi. Je félicite d'ailleurs le seul homme spectateur de la salle, qui a eu le courage d'accompagner son amie.


Réalisatrices :  Claudia Richarz et Ulrike Zimmermann
Pays : Allemagne
Année : 2014
Durée : 79 minutes

Ce documentaire a été vu dans le cadre du Festival de Films Elles tournent.

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