mardi 27 décembre 2011

Les contes macabres d'Edgar Allan Poe, traduits par Charles Baudelaire, illustrés par Benjamin Lacombe




Quel bel objet que voilà : recueil de huit nouvelles d’Edgar Allan Poe dans une édition inédite illustrée par Benjamin Lacombe à l’occasion du bicentenaire de la naissance de l’écrivain (date de la première édition en 2009). 
 
Chaque conte est rehaussé par les dessins de ce jeune illustrateur devenu une référence dans la littérature jeunesse, dessins qui apportent un petit supplément d’âme à ces contes mélancoliques morbides teintés de fantastique et de mysticisme.
 
Héros solitaires tourmentés par leurs pensées funestes, femmes sensuelles maladives et moribondes, il faut bien avouer que toutes ces nouvelles se ressemblent un peu. Je vous conseille de ne pas les lire à la suite sous peine de lassitude : un petit conte par jour est donc plus que suffisant sous peine de les confondre rapidement.
 
Je serais bien en peine de vous dire où commence la plume d’Edgar Allan Poe et où se termine celle du traducteur Charles Baudelaire tant j’ai l’intime conviction qu’elles s’interpénètrent habilement pour notre plus grand plaisir.
 
Quelques coquilles malheureusement subsistent, mais une très belle mise en page et une belle tranche de papier noire les rachètent sans peine.
 
Bon à savoir : l’édition de 2010 a été enrichie de la nouvelle Ligeia ainsi que de dessins couleurs inédits par rapport à l’édition 2009.
 
Les contes macabres de cette présente édition sont : Bérénice - Le chat noir - L’île de la fée - Le cœur Révélateur - La Chute de la maison Usher - Le portrait ovale – Morella – Ligeia. Présents également : Edgar Poe, sa vie, ses œuvres et les biographies & bibliographies de tous les intervenants (E.A.Poe, C. Baudelaire et B.Lacombe). 






A découvrir également :

* Notre-Dame de Paris de Victor Hugo, illustré par Benjamin Lacombe

lundi 26 décembre 2011

Limonov d'Emmanuel Carrère



Présentation de l'éditeur
 
« Limonov n’est pas un personnage de fiction. Il existe. Je le connais. Il a été voyou en Ukraine ; idole de l’underground soviétique sous Brejnev ; clochard, puis valet de chambre d’un milliardaire à Manhattan ; écrivain branché à Paris ; soldat perdu dans les guerres des Balkans ; et maintenant, dans l’immense bordel de l’après-communisme en Russie, vieux chef charismatique d’un parti de jeunes desperados. Lui-même se voit comme un héros, on peut le considérer comme un salaud : je suspends pour ma part mon jugement. C’est une vie dangereuse, ambiguë : un vrai roman d’aventures. C’est aussi, je crois, une vie qui raconte quelque chose. Pas seulement sur lui, Limonov, pas seulement sur la Russie, mais sur notre histoire à tous depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale ».
 
Je viens de terminer Limonov est mon sentiment est mitigé : j’avoue avoir souvent trouvé le temps long et ne pas bien comprendre tout l’enthousiasme que suscite ce livre mais son plus grand atout est sans conteste l’imbrication de la petite histoire dans la grande histoire de la Russie. J’ai apprécié également l’implication de l’auteur dans la trame du récit, fait avec parcimonie et intelligence. Sans doute me manquait-il cette fascination que porte Emmanuel Carrère à Edward Limonov pour me convaincre véritablement : difficile d'accrocher lorsque le personnage principal nous indiffère totalement. Difficile de dépasser cette impression que Limonov ne soit qu’une petite frappe avide de notoriété, aimant se mettre en scène en écrivant sa légende mais aboutissant toujours à la quincaillerie la plus vulgaire Un personnage sans élégance et manquant de consistance, un « m’as-tu-vu » assez trash pour fasciner un homme bien né comme Emmanuel Carrère, même si sans doute « c’est plus compliqué que ça ». Le plus grand reproche que je peux faire à l'auteur est le fait que ce personnage n’a jamais vraiment pris chair à mes yeux, un comble pour un récit qui ne fait pas l’impasse sur les détails crus (complaisants ?) de sa vie intime, souvent creux et sans intérêts. Je suis du coup restée à l’extérieur du personnage, avec cette impression étrange que tout un pan de la psychologie d’Edward Limonov a finalement échappé à Emmanuel Carrère, demeurant souvent au plus près des événements - tels que racontés dans les récits publiés de Limonov - nombreux et ne manquant pas de piquants, il est vrai. Reste le parcours d'un personnage hors norme et d'un pays tout aussi singulier. Livre qui tombe merveilleusement à point au vu des manisfestations à l'encontre du troisième mandat (ou plutôt d'un quatrième qui ne dit pas son nom) de Vladimir Poutine.
 
Si Limonov ne m’a pas totalement convaincue, il ne reste que cette première rencontre avec l’auteur m’a donnée envie d’aller voir plus loin en sa compagnie. Avec toutefois une notion de réserve. A suivre donc.
 
Prix Renaudot 2011

mardi 20 décembre 2011

L'Enfance d'Ivan d’Andreï Tarkovski



Nous sommes en pleine deuxième guerre mondiale. Le jeune Ivan, 12 ans à peine, ne vit plus que pour venger la mort de sa mère, tuée par les allemands en allant au puits. Il rejoint le front russe pour servir sa cause, s’infiltrant au risque de sa vie à l'intérieur des lignes allemandes pour fournir de précieux renseignements.

L’enfance d’Ivan est le premier long métrage d’Andreï Tarkovski (1962) et tout l’univers du réalisateur est déjà présent dans ce premier film : l’enfance meurtrie, la mère et son absence, le deuil, la nostalgie et la perte de l’innocence, la nature sublimée, les scènes oniriques et des images de guerre (rappelons que Tarkovski n'avait que 14 ans à la fin de la seconde guerre mondiale).


Mais ce qui frappe surtout est cette omniprésence de la matière liquide dans ce premier film et dans son œuvre en général : cette pluie qui purifie et qui peut sauver des vies humaines, en effaçant les traces de pas laissées sur le sol pouvant trahir notre présence à l’ennemi, cette eau qui nettoie et désaltère les corps, cette surface réfléchissante tel un miroir, le marais comme passage entre deux rives, entre deux mondes, ce lieu d’entre-deux sur lequel on conduit son embarcation tel Charon conduisant les ombres errantes des défunts vers le séjour des morts.


Un film sur l’attente, l’enfance sacrifiée, l’enfant vengeur devenu monstrueux malgré sa blondeur angélique,  aussi sombre et maléfique que les événements qui ont précédé cette rupture, ce point de non-retour. Un enfant qui déstabilise, qui a déjà tout perdu que pour connaître encore la peur, un enfant qui pose question, à qui on s’attache malgré son étrangeté, un enfant qu’on voudrait protéger malgré lui. Un enfant déjà mort.


Je retiens aussi quelques images magnifiques comme cette forêt de bouleaux, ce lieu préservé et à l’écart de la folie de hommes, l’étreinte (forcée ?) d’un homme et d’une femme au-dessus du vide d’une tranchée.


Présence déjà de la cloche en fonte, des chevaux, des icônes religieuses, des arbres, des ambiances crépusculaires et des miroirs et autres surfaces réfléchissantes.


Une première œuvre qui annonce le grand Tarkovski à venir, ce réalisateur construisant ses films comme autant de prières et de méditations sur la nature et la conscience humaine.


Titre original : Ivanovo Detstvo
Réalisateur : Andrei Tarkovski
Acteurs : Nikolaï Burlyaïev, Valentin Zubkov
Origine : Russie
Genre : Drame
Année de production : 1962
Durée : 1h34

Note : 5/5


A découvrir, du même réalisateur :

•   Le miroir
•   Nostalghia
•   Solaris