vendredi 11 avril 2008

De sang-froid de Truman Capote


Extraits

Ne pas être innocent

ne signifie pas

ne pas être humain.


[Perry]

Mon ami Willie-Jay en parlait souvent. Il disait que tous les crimes ne sont que des "variétés de vol". Le meurtre aussi. Quand on tue un homme, on lui vole sa vie. (…) Et les Clutter n'y étaient pour rien. Ils ne m'ont jamais fait de mal. Comme les autres. Comme les autres m'en ont fait toute ma vie. Peut-être simplement que les Clutter étaient ceux qui devaient payer pour les autres.


[Hickock]

Je veux simplement vous dire que je ne tiens rancune à personne. Vous m'envoyer dans un monde meilleur que celui-ci ne l'a jamais été.


Mon avis

De Sang-froid est l'analyse psychologique et sociale d'un quadruple meurtre dans un contexte bien précis : celui d'une famille de fermiers modèles, prospères et méthodistes de l'état du Kansas en 1959. Aucun mobile, aucun indice (à peine quarante dollars ont été volés) pour débuter l’enquête.

Truman Capote s'empare de ce fait divers tragique pour remonter à la source de cette sauvagerie en se posant les bonnes questions. Quel est le mobile du crime ? S'agit-il plutôt d'un règlement de compte ? Qui sont les assassins ? Des voisins jaloux ? Qu'est-ce qu'un criminel ? Un malade mental ? Quelqu'un au-delà du bien et du mal ? Responsable ou non de ses actes ? Ce criminel mérite-t-il la même sentence que celle qu'il a infligée à ses victimes, à savoir la mort ?

Alors que les habitants du coin s'enferment à double tour dans leur maison et restent éveillés toute la nuit tant que les tueurs n'ont pas été démasqués, Truman passe des mois dans le Midwest à compulser les dossiers et interroger les témoins, les voisins, les connaissances, les policiers ainsi que les tueurs dès que ceux-ci auront été identifiés et capturés par les enquêteurs.

Au-delà de l'enquête, Truman décrit également l'Amérique profonde qui ne reconnaît pas ceux qu'elle a engendrés malgré elle.

Au final, l'écriture de ce roman lui prendra 6 années durant lesquelles il nouera une relation privilégiée avec Perry Smith, l'un des deux tueurs. Truman Capote assistera, à la demande des deux assassins reconnus coupables et condamnés à mort, à la pendaison de chacun d'eux. Son amie d'enfance Harper Lee, qui l'avait accompagné au Kansas au début de ses investigations, dira que ce jour là, ce ne fut pas 2 mais 3 personnes qui furent montés sur le gibet. Truman ne s'en remettra jamais et verra sa plume se tarir comme s'il lui était devenu impossible de sublimer sa souffrance en passant par l'écriture.

Loin de tout manichéisme et de tout jugement, ce classique de la littérature valut la gloire et la fortune à l'auteur mais le conduisit également à la dépression, ému et marqué à jamais par sa rencontre avec Perry Smith.

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